Magali Harvey (Lionnes) : "Il y a des choses exceptionnelles dans ce championnat mais on manque de médiatisation !"

3 jours avant la réception du Stade Français prévue dimanche à 15h00 au stade Sainte-Germaine, Magali Harvey, l'ailière canadienne des Lionnes du Stade Bordelais, nous parle de son parcours et de son arrivée chez les championnes de France en titre cette saison.

Magali Harvey - Lionnes du Stade Bordelais - Bordeaux - Best woman player 2017

Pour les supporters de l’UBB qui ne te connaîtraient pas encore, comment te présenterais-tu rapidement ?

Je m’appelle Magali Harvey, je viens de la ville de Québec (Canada) et je joue ailière pour les Lionnes.

Comment as-tu commencé le rugby ? Qu’est ce qui t’a donné envie de jouer au rugby ?
Il faut savoir qu’au Canada c’est assez différent de la France, le rugby n’est pas très populaire. Quand j’ai commencé ça venait d’être introduit en enseignement secondaire et c’était comique parce que personne ne savait jouer, même les entraîneurs ne savaient pas comment coacher le rugby… J’ai commencé à jouer parce que je jouais au soccer (football), au basket, et que je faisais de l’athlétisme et que beaucoup de monde m’a dit : "tu devrais essayer le rugby !"
Quand j’ai commencé, j’ai trouvé ça horrible, car j’étais assez superficielle et j’avais peur de me détruire la face (rires). Mais je me suis aussi rendu compte que j’étais plus rapide que tout le monde, du coup je pense que j’ai commencé à aimer ça parce que j’étais plutôt bonne… Puis par la suite j’ai été appelé par Rugby Canada pour jouer avec les U20, à l’époque je jouais encore au football, je venais de ne pas être retenue dans le squad d’une équipe semi-pro et j’étais bien trop orgueilleuse pour continuer dans le foot… donc à ce moment là je me suis dit je vais tenter le rugby !
Quand je suis rentré dans l’environnement de Rugby Canada j’ai trouvé ça super car le niveau de jeu était top, c’est vraiment là que j’ai appris à jouer et à aimer le rugby, c’est le véritable début de l’aventure pour moi.

Tu as ensuite poursuivi en rugby à 7 ?
Oui. Je me suis ensuite fait recruter pour jouer à l’université (Université Saint-Francis-Xavier en Nouvelle-Écosse, ndlr) et c’est donc le rugby qui a payé mes études. C’est aussi la raison pour laquelle j’ai continué à jouer. Puis en 2009, après l’officialisation de l’entrée du rugby aux JO (à Rio en 2016), le Canada a vraiment commencé à mettre le paquet sur le rugby et à faire du recrutement, notamment dans les universités. A l’époque la mienne était la meilleure et j’avais été nommée meilleure joueuse du championnat, donc j’ai été logiquement appelé pour faire un tournoi à Las Vegas avec l’équipe nationale du Canada (en 2010). Pour cette première convocation, Rugby Canada avait appelé environ 60 joueuses pour un stage d'une semaine, et chaque jour des joueuses étaient renvoyées jusqu’à ce qu’il n'en reste plus que 14 pour participer au tournoi. J’ai été finalement sélectionnée, alors que j’étais la plus jeune et la plus inexpérimentée et que je ne maîtrisais pas toutes les règles du Sevens… C’est comme ça que j’ai commencé mon aventure avec le Canada, on a même gagné le Tournoi, c’était super !


magali harvey avec le canada lors de la coupe du monde 2017 (Icon Sport)

Tu joues aujourd’hui aux Lionnes, mais auparavant dans quels clubs et championnats as-tu évolué tout au long de ta carrière ?

En 2017, j’ai arrêté de jouer et j’ai repris mes études, j’ai d’abord fait un bachelor en communication, puis par la suite une maîtrise en business, mais je me suis rendue compte que le rugby me manquait vraiment… surtout le haut niveau. La quête de la performance, c'est super intensif, et quand tu sors de ce monde et que tu rencontres des gens qui ne sont pas des joueurs de rugby, tu découvres des mentalités complètement différentes.
Cette mentalité rugby et performance me manquait. Du coup après mes études j’ai décidé de reprendre le rugby pour voyager. J’ai joué aux Tokyo Phoenix, puis en Nouvelle-Zélande, notamment aux Chiefs, en Espagne avec l'Olimpico Pozuelo, et enfin en France aux Lionnes cette saison.

Pour quelles raisons avoir choisi les Lionnes du Stade Bordelais ?

Ma « relation » avec la France est assez ancienne. Elle a commencé en 2014, quand j’ai gagné le titre de meilleure joueuse du monde (élue par l'IRB), j’ai eu beaucoup d’attention médiatique sur moi et donc pas mal d'offres de recrutement. Mais à l’époque je poursuivais un rêve olympique, je n’étais pas intéressée... J’ai alors développé une relation amicale avec un dirigeant des Lionnes et on est resté en contact avec les années, jusqu’à ce que je joue à Madrid et qu’on commence à évoquer ma venue en France aux Lionnes .
Ce qui est bien avec les Lionnes c’est que ça commence vraiment à se développer de façon professionnelle. Par exemple ici on a un préparateur physique dédiée à l’équipe, alors que dans d’autres pays sont parfois très en retard au niveau féminin..

A ce propos, que penses-tu du niveau de jeu du rugby féminin en France ? Et de son développement ?

Pour tout dire je suis à la fois impressionnée et déçue... Je m’explique : en terme de joueuses c’est top, il y’a des joueuses exceptionnelles qui jouent dans ce championnat et je crois qu’il y’a beaucoup de potentiel… mais d’un autre côté le championnat est très déséquilibré, il y’a des matchs que l’on gagne par 70 points d’écart, ce n'est utile pour personne et ça ne contribue pas à ce que le rugby féminin soit pris au sérieux. Il y’a autre chose qui me gêne, on est la première division et nos matchs ne sont même pas retransmis, alors que côté masculin, même si on n'est pas fan de rugby, on a juste à allumer sa télé pour tomber sur du rugby ou ses réseaux sociaux pour voir des highlights du dernier match…

Il y a beaucoup d’efforts réalisés pourtant, mais sans doute pas assez en matière de de communication et de marketing, je trouve ça dommage.. Par exemple sur certains matchs il il y a des trucs exceptionnels mais personne ne va jamais les voir... car personne ne filme. Pour vous donner une idée, en 2014 j’ai marqué un essai (contre la France en demi-finale de la Coupe du Monde) et l’action est régulièrement re-postée sur les réseaux parce qu’il n'y a pas assez de nouveaux contenus de rugby féminin à poster sur les réseaux sociaux (rires)

Pour revenir sur les Lionnes, depuis le début de la saison, vous n’avez pas perdu un seul match. L’objectif c’est le doublé ?

Alors pour parler au nom de l’équipe, oui forcément, je pense que tout le monde veut gagner (rires)… Mais dans notre cas, pour moi, il y a autre chose d’important. On a tellement de joueuses exceptionnelles dans l’équipe que parfois, même si je ne devrais pas dire ça, on sait qu’on va gagner les matchs et du coup on ne joue plus en équipe. On ne reste pas dans notre structure de jeu. Pour moi le challenge de la fin de saison ça va être ça : jouer en équipe et respecter notre structure, ça nous permettra de devenir une « équipe star » et non plus seulement des « joueuses star » si je puis dire.

Vous recevez dimanche le Stade Français Paris, c’est quoi ton état d’esprit à l’approche de ce match ?

Je vais rester sur ma réponse précédente (rires), pour moi le challenge de ce match ça va être de jouer en équipe et de penser en équipe pour réaliser un bon match !

MAGALI HARVEY SOUS LE MAILLOT DES LIONNES CETTE SAISON (PHOTO : LIONNES)

Retrouvez l'interview complète de Magali Harvey ce vendredi soir dans le mag du match UBB - Pau !

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